28 févr. 2011

La rubrique ciné d'Olivier



Warriors, l'impossible mission

Téléfilm anglais de Peter Kominsky, 1999

Avec: Ioan Gruffuld, Matthew Macfadyen, Damian Lewis

Il peut sembler étrange que mon premier article cinématographique concerne non pas un film mais un téléfilm, genre en général fort peu prisé. Pourtant je n'en ai pas fait le choix par hasard. Outre les formidables critiques dont il fut l'objet à sa sortie, ce téléfilm fort bien fait aborde de façon brutale des évènements historiques récents que malheureusement l'histoire tend à effacer trop vite.

L'Europe, contrairement à l'Amérique a du mal avec la guerre. Combien d'années a t'il fallu pour qu'en France commencent à sortir des films sur les guerres d'Indochine ou d'Algérie ? Même la plupart des œuvres concernant la seconde guerre mondiale sont issues d'Outre Atlantique. La terrible guerre civile de l'ex Yougoslavie n'échappe malheureusement pas à cet oubli. Encore aujourd'hui, beaucoup ne se souviennent plus de ses tristes évènements qui pourtant datent d'il y a moins de vingt ans maintenant...

En cela Warriors fait figure d'exception. Ce film vise au travers du trajet de quelques jeunes anglais à montrer ce qui fut une tragédie humaine à quelques heures à peine de nos capitales. Filmé par Peter Kosminsky, un réalisateur de documentaire de guerre, cette fiction se veut le témoin d'un immense gâchis humain où il n'y a ni gentils, ni méchants, juste un triste récit de la cruauté humaine dans ce qu'elle a de plus sinistre. Ne prenant parti pour aucun camp (Serbes, Croates, Bosniaques, tous sont à la fois victimes et bourreaux), Warriors nous montre simplement que ce genre de guerre civile n'est pas une spécificité du tiers monde mais que non loin de chez nous, des génocides peuvent encore avoir lieu et pose la question de la non-intervention.

1992. L'ex Yougoslavie vient d'éclater en une multitude de nations où différentes populations vivant jusque là en paix se mettent à se faire la guerre. Les premières rumeurs de massacre parviennent aux capitales occidentales et, sous l'égide de l'ONU, il est décidé d'envoyer un contingent de casques bleus là bas. Ce sera la FORPRONU. A Manchester, une poignée de jeunes soldats et officiers sont appelés pour servir en Bosnie pour une mission à priori simple: Acheminer l'aide humanitaire aux populations civiles dans un pays en proie aux luttes ethniques.

Très vite tous déchanteront et n'en reviendront pas indemnes. Car être casque bleu revient à ne rien faire, à se contenter d'acheminer une aide alimentaire ou médicale sans pouvoir sauver les populations et à n'être que le témoin impuissant des horreurs d'une guerre que personne ne comprend. Recevant l'interdiction claire et formelle de leur hiérarchie et des institutions de l'ONU d'intervenir, ses dernières ayant peur d’être accuser de participer au nettoyage ethnique en aidant au déplacement des populations, les jeunes soldats ne peuvent qu'encaisser les scènes de guerre auxquelles ils sont confrontés. Le film alterne d'ailleurs fort bien les scènes de la vie de tous les jours d'une population qui ne sait de quoi demain sera fait et scènes beaucoup plus dures. Dans ce cauchemar réel, les protagonistes survivants se verront tous marqués à vif, comme au fer rouge par ce qu'ils y vivront. Avec eux, nous vivons les conséquences d'un massacre qu'ils ont été incapables d’empêcher.

Mais le film ne s'arrête pas sur ce moment présent. La richesse de ce téléfilm est de conter le retour de ces vétérans au pays. Un pays qui se moque bien d'ailleurs de ce qu'ont vécu ces soldats de la paix et qui préfèrerait les oublier. Livrés à eux-mêmes, les jeunes héros peineront à se réinsérer dans une société qui ne veut pas savoir ce qu'ils ont vécu dans l'enfer où elle les a pourtant envoyé. Lâchés dans le monde sans aucun soutien psychologique, les soldats devront apprendre à vivre avec les démons intérieurs ou sombrer de façon tragique...

Au niveau de la réalisation, on comprend très vite que Peter Kominsky est un habitué des documentaires. La mise en scène est sobre, sans fioriture et efficace. Les dialogues vont à l'essentiel, car en définitive il n'y a rien à dire, il suffit de voir. Les scènes de guérilla urbaine ne cherchent pas le sensationnel et même la découverte des atrocités commises par les camps en présence revêt un réalisme saisissant. Les acteurs jouent particulièrement bien (mention spéciale à Ioan Gruffuld en officier idéaliste rattrapé par la réalité) et nombre de figurants sont des bosniaques ayant connu cette triste époque (ce qui nous donne une impression de vérité à l'ensemble). Les presque trois heures de cette œuvre de fiction passent très vite jusqu'au dénouement finale, scène émouvante résumant sobrement la problématique du film.

Maintenir la paix peut être tout aussi traumatisant que de faire la guerre. Warriors est à voir, ne serait-ce que par simple devoir de mémoire envers ces populations que nous avons laisser tuer et ces jeunes gens que nous avons trop vite oubliés.

Le film est disponible en streaming français sur youtube:


Article réalisé par Olivier

1 commentaire:

  1. Merci Olivier pour ton article j'aime beaucoup ^^
    Impatiente de lire le suivant!

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Merci pour le commentaire