28 févr. 2011

Histoire d'homme: Thibald Webster

Voici l'histoire d'un homme. Je l'ai écrite dans le cadre d'un jeu de rôle il y a quelques mois maintenant et tombée sous le charme de ce personnage, j'ai décidé de vous le partager ici.



    Réveil... Ils me regardent tous les deux fixement... Je commence:

    «L'histoire n'est qu'un point de vue, la vie une suite d'événement absurdes... Je ne fais pas exception à cette règle.
    Si quelqu'un devait vous raconter mon histoire, je ne la reconnaîtrais probablement pas et pour le reste je crois que ça se passe simplement de commentaire.
    Je vous ai déjà dit que ça n'avait aucun intérêt? Non? Bien, si j'étais vous je sauterais tout de suite quelques lignes pour vous épargner un peu de temps. Il paraît que c'est de l'argent alors je ne voudrais pas vous devoir quoi que ce soit. Les dètes ces pas mon truc, devoir la vie à ce qui m'a servi de parent est déjà assez pénible que pour en ajouter d'avantage.

    Mon nom est Thibald, Thibald J. Webster, fils de Kristian F. Webster et Claire S. Crèvecoeur, né à Brighton dans le Sussex au prestigieux Nuffield Health Brighton Hospital. Hahaha! Dit comme ça, je pourrais presque passer pour quelqu'un de bien non? Mon nom est issue de la célèbre pièce de Shakespeare: Roméo et Juliette. Vous savez le meilleur ami qui se fait planter par Mercucio? Et bien c'est moi! Du moins celui dont mes parents on volé le nom pour gracieusement me l'attribuer. C'est joli Thibald... Combien de fois ne m'a-t-on pas dit que j'avais un bien beau prénom? Je ne compte plus en fait parce que pour moi ce n'est jamais que le nom du type qui crève au début et dont tout le monde se fout. Je ne suis qu'une distraction, un entracte, un amuse bouche avant le plat de résistance. N'allez pas croire que j'ai vécu dans l'ombre d'un frère tyrannique ou d'une soeur trop belle que pour n'être le centre de tout. Non, j'étais enfant UNIQUE! Trop unique au goût de mes parents qui se serraient certainement passés de cet encombrement inutile dans leurs vies sans taches.

    Que je vous explique: Claire S. Crèvecoeur ma génitrice est issue de l'aristocratie française, je ne me souviens pas exactement de leurs titres et noms complets mais dans le genre nom trombone c'était pas mal. Son père et sa mère voulant lui offrir une éducation complète et variée l'avaient envoyé à Londres pour qu'elle apprenne le théâtre et l'anglais (Vous venez sans doute de comprendre pourquoi je m'appelle Thibald). La-bas loin de sa famille, elle fit sa place dans une troupe Shakespearienne qui connut un franc succès dans les années '70. Elle parcourait toute les Royaume-unis et incarnait tour à tour: Juliette, Ophélie, Lavinia ou Catharina. Elle était belle, elle était douée et surtout elle traînait derrière elle une foule d'admirateurs qui ne demandait qu'à se pendre à son cou pour une soirée ou plus encore. Ma mère fut choyée par les anglais et ne voulu jamais retourner en France. D'ailleurs, je n'ai jamais rencontré mes grands parents maternels, ils doivent être morts depuis longtemps à présent et on s'en fout!
    Bref, à force d'être l'objet de tant d'attention, je pense qu'on fini par changer et si ma mère au théâtre singeait magnifiquement bien les sentiments, elle était en réalité incapable de ressentir quoi que ce soit dans la vie réelle. A force de mentir au public elle avait perdu de vue la réalité des passions humaines, tout était sur-joué, tout était démesuré, elle rivalisait de caprice avec les plu grandes divas malgré que sa troupe reste quelque peu modeste. Je crois qu'il est difficile de ne pas développer un ego démesuré lorsque l'on est l'objet de toute les attention cinq soirs par semaine et au delà. On dirait sans doute aujourd'hui qu'elle avait chopé la grosse tête ou qu'elle se prenait trop au sérieux. C'était vrai et ça l'est peut être encore, puisque bien des années après avoir arrêté sa carrière, elle s'embaumait toujours de ses anciennes gloires et se faisait prier pour déclamer quelques alexandrins en société... Folle...
    C'est sans surprise qu'à 21 ans elle fini par se marier à un riche industriel de Brighton, mon père. Si celui-ci se targuait d'être un esthète accomplit, ma mère l'avait surtout choisi pour les intentions diverses dont il faisait montre en la couvrant notamment de bijoux hors de prix et de fleurs. Je n'ai jamais vraiment comprit cet amour pour les fleurs agonisantes qu'ont les femmes, enfin soit.

    MON PERE... Mon père lui était l'héritier d'une grosse entreprise de transport maritime qui avait ses bureaux au quatre coins du monde. Si durant mon enfance il n'avait pas été très présent car toujours parti en voyage à la recherche de nouveaux terrains d'exploitation, il avait su être très présent durant les premières années de mariage et je crois que quelque part lui et ma mère avaient du s'aimer sincèrement. Enfin ce n'était pas leur truc l'amour, tout ça, sauf en public mais ils se plaisaient dans leur union et ça je n'en doutais pas.
    Donc, mon père était un type heu...
    En fait, je me rends compte que nous n'avions jamais développé de réels rapport lui et moi. Il faut dire qu'il était de la vieille école, comme il aimait à me le rappeler quand je commettais la folie de lui réclamer un peu d'affection. Je n'ai jamais vu chez lui aucune marque de faiblesse, je me rappelle même m'être parfois demandé s'il respirait étant petit. Ceci dit, tout cela n'était qu'une façade, un mur de papier paré des plus belles tapisserie pour cacher peut être un être humain. Peut être bien, mais je ne l'avais jamais vu cet humain là. Avec mon père tout étais question de contrôle et de devoir et il n'y avait de la place pour rien d'autre à part les caprices de ma tarée de mère. Ah oui avant de clore le chapitre papa, je dois signaler le fait qu'il a une soeur aînée que j'ai rencontré une ou deux fois. Tante Orthance! Je la hais... HAIS, HAIS, HAIS! Cette femme est tout bonnement mauvaise, il n'y a rien à dire de plus sur elle si ce n'est que je la HAIS autant que je déteste son faciès de vieille chouette!

    Depuis ma plus tendre enfance, j'étais devenu pour ma mère une espèce d'excuse à de nouvelles lubies et un jouet ou plutôt une sorte de poupée. J'étais malade TRES TRES TRES TRES malade! Elle l'avais décidé le jour de ma naissance et ça ne changerait jamais peut importe ce qui pouvait arriver! Non, non, non, aucun espoir d'amélioration. Elle se plaisait à étaler toute sa peine, à disserter sur la difficulté que c'était d'avoir un tel petit garçon, elle exhibait mon cas presque comme c'était coutume de le faire dans les cabinet de curiosité au XIXème siècle. Quel cinéma pou dépeindre son calvaire c'en était presque shakespearien... Hin, hin... En échange de ce spectacle, ses connaissances la plaignait généreusement, ce qui ne faisait que renforcer la ferveur de ses plaintes lancinante.
    J'étais devenu un prétexte à tout! Pour son anxiété, pour ses sautes d'humeur, pour sa fatigue. Pour ne pas devoir sortir dans le monde elle allait même jusqu'à m'inventer des pathologies toutes plus exotiques les unes que les autres, parce que, comprenez-vous, je risquais la mort si elle me laissait seul! Mais le plus beau dans toute cette mise en scène c'est que de la sorte, elle passait pour la plus aimante et attentionnée des mère...

    Evidement son comportement ne fut pas sans conséquence sur moi: répétez à quelqu'un qui est malade et traitez le comme tel, il fini par le devenir. Ma mère avait fait de moi un être fragile, inquiet de la moindre blessure, du moindre coup de froid, de la moindre fatigue... Pathétique... Putin...

    Non... Non...
    Non je continuerai pas à raconter! Foutez-moi la paix bordel!
    Vous savez, vous êtes chiants, c'est quoi cette manie de demander à chaque nouveaux arrivants d'étaler sa vie?!
    Ouais, je sais la règle c'est la règle, j'me fume un sèche et j'continue... VOYEURS!

    C'est bon, c'est bon, je continue...
    A 12 ans un médecin ou un psychiatre, je ne sais plus trop, fini par décrété que j'étais surdoué. Je n'allais déjà pas beaucoup à l'école avant, j'allais encore moins y aller après... Mes parents avaient décidé que finalement côtoyer le monde scolaire n'était qu'une perte de temps et une sorte de nivellement par le bas pour une être doué comme je l'étais. Il ne fallait surtout pas gâcher les capacités de l'enfant prodige en le laissant jouer à des jeux abrutissant avec ses camarades (déjà peu nombreux à l'époque), aussi des précepteurs particuliers (tous grabataires et soporifiques) serrait plus adéquat à mon épanouissement.
    A partir de cet âge je n'ai plus vu un seul enfant de mon âge. PAS UN!
    Imaginez qu'il ne me restait plus grand chose pour défouler mon esprit que je croyais aussi malade que mon corps. Pour ajouté au comique de l'expérience, mes parents me privèrent de toute lecture romancée. "L'HISTOIRE! Il faut que tu connaisses, l'histoire!" Scandait ma mère qui elle n'hésitait pas à s'abreuver de Molière, de Corneille et autre magnifiques auteurs de théâtre, riant au éclats devant moi qui en était privé jusqu'à nouvel ordre.
    Pas de romans, pas de pièces, pas de jouets, pas de sorties car trop faible évidement, pas d'amis, même pas de télévision, excepté à l'heure des informations. Imaginez bien que c'était devenu le moment le plus attendu de la journée. Non seulement je voyais que je n'étais pas seul dans le monde mais aussi qu'il y avait d'autre façon de vivre (et de mourir). Le journal parlé, diffusant sans cesse les pires catastrophes, les guerres, les attentats, les crises, les escroqueries, les grèves et les meurtres était devenu mon seul espoir et mon seul échappatoire en dehors de la maigre évasion que me procurait les livres d'histoire. Ceux-ci ne faisait que dépeindre froidement les traits de temps révolus et bien que parfois l'histoire elle même se trouvait être palpitante de par les faits, cette plume acariâtre la rendait totalement indigeste et presque sans intérêt. Parfois, j'aurais aimé pouvoir me télé-porter au coeur de l'actualité: Voir de mes propres yeux l'assassinat de l'archiduc François-Ferdinand, observer la débâcle, entendre les gens hurler, sentir l'odeur de la poudre et du sang. Juger les nobles à la révolution française, faire tomber les tête pour reconstruire le pays sur la terre fertile abreuvée par le sang de l'ancien pouvoir de droit divin. Participer aux manifestations non-violentes du Mohandas Karamchand Gandhi, me joindre à cette résistance face à l'oppression à l'aide de la désobéissance civile de masse.
    La masse! C'était ça la force, l'histoire ne cessait de me le crier aux oreilles et moi j'étais seul, seul face au despotisme de mes parents.

    La suite?
    Vous êtes bien curieux... Ca n'a pas d'intérêt je vous l'ai déjà dis! J'suis parti voilà... Vous êtes content?
    Hahaha!!!! Non hein... Ca ne vous suffit pas, il vous en faut encore, toujours plus. VOYEURS HYPOCRITES!

    La suite... Elle n'est pas plus intéressante que le début et en plus il n'y a pas de fin... Je ne suis pas mort et quand bien même la mort est elle une fin satisfaisante? NON... La mort n'a rien d'exceptionnel, c'est bête la mort! Tout s'arrête d'un coup, l'histoire est coupée net en plein milieu et personne n'est là pour la continuer. Rare sont les morts exceptionnelles, celles dont on parle. Quand on meurt les gens veulent surtout oublier pour continuer et ne me dites pas que vous ne faites pas pareil... La mort c'est juste un point final pathétique à une construction souvent insensée.

    Bref, la suite!
    Peut être vous attendez-vous à quelque chose d'exceptionnel, mais il n'en est rien. Un jour alors que ma mère était entrain de se prélasser une heure supplémentaire dans son bain, (elle passait de longues heures à se laver, vous savez: LES MICROBES!), des livreurs étaient venus pour déposer le nouveau canapé que mon père avait choisi d'installer dans son bureau. Le temps de décharger, ils avaient laissé la grande porte de l'entrée ouverte et je suis sorti.
    D'abord j'ai été jusqu'au coin de la rue et rien ne se passa, je pensais qu'on m'aurait rattrapé, que les forces de l'ordre m'auraient intercepté, ligoté, bâillonné et renvoyé à la case départ mais non... RIEN!
    Alors je continuais... Je marchais enchaînant une rue, puis une autre et encore une autre! Je ne me souvenais plus avoir marché aussi loin tellement c'était rare pour moi de quitter l'enceinte de ma prison dorée. Car, il faut que je vous dise: pour ma mère, même les plus prestigieux médecins se déplaçaient jusqu'à mon chevet.
    J'ai marché comme ça longtemps, très longtemps et sans savoir où j'allais, jusqu'à mon arrivé face à la mer... Vous savez la côté est magnifique aux abords de Brighton; au delà des falaises blanches, il n'y a plus que le ciel et la mer s'étendant à perte de vue...


    Je suis resté là des heures à contempler le spectacle, sans même me demander si on me cherchait, si mes parents étaient inquiets, si j'y retournerais... Ou pas...
    Finalement ce fut le 'pas' qui l'emporta, non ce n'était pas prémédité, d'ailleurs peut être que j'y retournerai un jour, ou bien 'pas'.

    Tsss... Mais vous êtes incorrigibles! Je vois déjà les questions dans vos yeux! Non, j'avais pas d'argent, non je n'avais pas de vêtements, non, non, non! Je n'avais rien! Que mes deux pieds pour avancer et la soif pour leur donner l'envie de le faire! Il faut croire que parfois c'est suffisant.

    Après un ou deux jours à errer comme ça, je ne sais plus trop, j'avais faim! Quoi de plus normal?
    Et c'est par l'odeur alléché que je fini par trouver ce qui allait être ma première révélation, mon premier stimuli de vie propre. Non loin de la côte, un peu plus retiré dans les terres, j'étais tombé sur un campement assez hétéroclite de diverses roulottes. C'était un rassemblement des gens du voyage, des gitans. Je ne savais pas vraiment ce que c'était ni ce que cela signifiait, les livres m'avaient juste apprit qu'ils avaient été aussi bien pourchassés par le nazisme que les juifs ou les anarchistes mais je ne savais rien de plus. Ils étaient tous de la même famille ou quelque chose qui s'apparente à une famille plutôt et comme je marchais, moi aussi j'étais de cette famille.
    C'était aussi simple que ça! Je n'avais que 18 ans quand les Valestrera's m'accueillirent dans leur roulotte pour parcourir les routes de Grande Bretagne. Avec eux j'ai tout apprit, tout ce qui ne se trouve pas dans les livres. En faire la liste est impossible tellement c'est vaste mais si je suis un homme aujourd'hui, c'est par leur enseignement.
    J'ai vécu dix années avec eux, sans jamais avoir aucune nouvelle de mes parents et sans que jamais il ne me pose de question. Dix ans au cours desquels j'ai vécu de passion et de dur labeur, dix ans de musique et de spectacle, dix ans où je ne fus lus jamais malade... JAMAIS! BORDEL! PAS UNE SEULE PETITE FOIS!

    Oui je soupire et alors? Ca ne vous donnerait pas envie de soupirer d'avoir été enfermé et torturé par des traitements lourds durant 18 années, pour rien? Pour satisfaire le besoin de distraction d'une folle encouragée par ses médecins...
    Alors oui, je soupire... Ca m'évite de regretter. Les regrets ça ne sert à rien.

    J'ai quitté ma famille d'adoption à l'âge de 28 ans avec de nouvelles cartes en main. Des cartes que j'avais choisies dans le paquet, que j'avais apprit à apprécier pour leur véritable valeur. La vie de saltimbanque me plaisait, vraiment c'était quelque chose qui m'apportait un plaisir immense que de partager mon existence avec les autres membres de cette communauté. C'était d'ailleurs de loin ma plus riche expérience mais j'avais besoin de racine, j'étais un sédentaire dans l'âme et même si j'étais comme un des leurs, je ressenti le besoin de poser mes valises, arrêter ma roulotte, trouver un habitat de pierre pour mon violon...
    Ils sont partis... Rufus Valestrera (mon père) jouait un air que je n'oublierai jamais perché sur le toi de sa maison alors qu'elle s'éloignait sur la route et moi je restais là, sans bouger à les regarder disparaître.
    Il n'y a rien à dire de plus sans que ça soit dramatique à outrance et aucun mot ne serrait assez fort pour expliqué le déchirement qui m'habite depuis ce jour. Alors autant continuer non?

    Mh... Je savais que vous pouviez être un peu pudique si on vous le demandait.

    ...

    ...

    C'est à Cambridge, pas très loin de Londres que j'avais finalement atterrit.
    Cambridge est... Une jolie ville. Si, si vraiment! Mais il me fallu pas mal de temps avant de vraiment la voir. Avant de sentir qu'elle vivait, qu'elle avait une personnalité propre, une histoire. Vous savez quand on est déraciné longtemps, l'adaptation à un lieu fixe peut prendre pas mal de temps. Au début, je ne mêlait pas à la foule, je vivotais en enchaînant job minable sur job minable: livreur, éboueur, magasinier, colporteur, distributeur de journaux. Ca ne suffisait pas pour se loger, se vêtir et manger, alors je volais pour compléter. Je vais peut être nourrir une idée peu reluisante concernant mes frères du voyage mais il est si facile de prendre quand on sait comment ne pas se faire prendre. Rufus dirait que lorsque l'on a pas d'autre choix on est obligé de se servir des faiblesse des autres. Ce n'était pas ma faute après tout si les marchands étaient trop occupés à crier la qualité de leurs produits que pour remarquer la main chapardant une pomme ou une charcuterie quelconque.
    J'avais installé mon cocon dans une mansarde au toit couvert de lézardes mais je m'y plaisait. Ce n'était pas beaucoup plus grand que ma roulotte, pas bcp plus petit que la chambre dans laquelle j'avais été cloîtré 18 ans. Ca me convenait! Le soir je montais sur le toit pour faire pleurer mon instrument loin de ses frères et soeurs à corde.

    Je ne vous ai pas beaucoup parlé de mon violon. En fait c'est le père de Rufus qui l'avait reçu un jour d'un luthier alors qu'il parcourait les routes d'Italie avec sa tribu. Je ne connais pas les circonstance exacte de ce don, Rufus était jeune à l'époque et il se souvenait juste de cet homme fabricant d'instruments, pleurant presque en écoutant son père.
    Bref! Le couple Valestrera n'avais pas de fils, je me dis aujourd'hui que c'est peut être pour ça qu'ils m'avait accueilli si facilement chez eux. La transmission est très importante chez les gitans, tout ce passe comme ça ou presque. Toujours est-il qu'après quelques années d'apprentissage de la musique, il m'avait fait don de ce splendide instrument. C'était un précieux héritage et j'en avais pleine conscience. On ne donnait pas le violon de la famille à n'importe quel musicien et lui même n'y avait que rarement touché ne s'estimant pas digne d'en jouer.
    Oui j'était doué, si c'est ce que vous voulez savoir... Et même si je n'avais aucune formation rhétorique en musique, ma sensibilité naturelle parait très bien à ma technique peu conventionnelle.
    Les saisons s'enchaînaient rapidement à cette époque. Quand je ne travaillais pas je passais mes journées à la bibliothèque de l'université complétant les derniers trous que mon éducation avait pu laisser. La bibliothécaire avait apprit à m'apprécier, elle me laissait m'installer sur un table pour lire quand je voulais sans carte d'étudiant et moi je venais lui jouer quelques morceaux classiques apprit sur le tas chez elle quand elle en manifestait l'envie.
    C'était une dame assez âgée, je la respectais... Le respect des aînés, encore quelque chose qui me venait de ma vie de bohème. Enfin... Quand je venais chez elle pour jouer elle m'offrait le repas, quelques partitions à apprendre, son oreille avisée et ses encouragements. Ses échanges me nourrirent un bon moment et pas que sur le plan musical puisqu'elle fini même par consentir à me prêter les livres qui peuplaient sa bibliothèque personnelle. C'est comme ça que j'ai fini par absorber des tas de romans, que dis-je des tonnes de romans, il m'en fallait toujours plus. Encore et encore et ENCORE! L'irréel avait quelque chose de plus, face à l'histoire. La romance était savoureuse, il n'y avait plus de limite et mon ciel ne me parut jamais plus vaste que quand je découvris Thomas More et Isaac Asimov. Les fous, ils avaient dit merde à toute convention et inventé l'inimaginable, c'était autre chose que de l'absurde, c'était plus. Désormais, il m'appartenait à moi aussi de rêver, de pousser les limites de mes envies et de mes capacités. A présent plus question de voler, plus question d'agir en animal comme vous, grappillant la moindre miette de mon histoire! Pfff... PATHETIQUE BESTIOLES!
    Mon toit et le boudoir de mon mentor n'étaient plus mes seules scènes à présent, je jouais dans la rue, renouant avec mon passé de saltimbanque, je m'essayait aux cuivres, aux percussions et séduisait la foule en homme orchestre. Thibald l'homme orchestre! Le soir je jouais devant quelques bars et boites, ramenant souvent des conquêtes d'un soir dans mon modeste logis. Je n'étais qu'une distraction pour elles mais il en était de même pour moi. Jamais je ne m'attachais, me contentant en virtuose de faire gémir ses donzelles sur des accords inconnus de mes très chers instruments. Mes amis... Nous étions bien, nous étions heureux et nous ne dépendions plus de personne.

    Plusieurs années s'étaient écoulées quand Mary-Jane, c'est ainsi qu'elle se nommait, fini par me présenter à l'une de ses connaissance ou cours d'une audition privée. Ce n'était pas tant le violon qui intéressait cette femme, elle cherchait quelqu'un pour tenir sa librairie à Londres et son amie m'avait proposé pour le post. Il y avait un appartement de fonction en haut de la boutique, toutes les commodités et surtout une infinité de livres! Le salaire dépendait des ventes mais au final je n'en avais que faire, impossible pour moi de refuser même si pour la première fois de ma vie j'avais prit racine dans un endroit qui me satisfaisait. Londres saurait sûrement me plaire... J'espérais... J'acceptais.

    Quoi la suite? Mais bordel de MERDE! Vous la connaissez la suite! Je ne suis jamais monté dans ce fichu train, JAMAIS!
    Bande de rats... LAISSEZ MOI SORTIR D'ICI! VOUS ENTENDEZ?

    Non... NON! Partez pas... Je voulais pas... Attendez, j'ai pas fini... Je veux pas... Je veux pas mourir ici! Je suis malade vous entendez?»

    Un sanglot raisonna entre les murs de pierre lugubres de la cellule, mes chaînes remuant au gré de mon corps se tordant de désespoir. Les rats étaient partis et je ne pouvais même plus leur raconter ma propre histoire pour me rassurer sans risquer de sombrer dans une folie douce. Il n'y avait plus de publique. Où j'étais? Aucune idée... La dernière image claire fut celle de cette femme étrangement séduisante dans un couloir sombre et désert de la gare de Cambridge puis plus rien.
    Pour la première fois, peut être allais je devoir m'en remettre à dieu? Non, j'allais attendre... Attendre encore un peu... Ce n'était pas fini, non rien ne serrait fini tant que je n'aurais pas soufflé mon dernier soupir. ATTEND!

19 commentaires:

  1. Ha ha ha ha, je m'attendais à une fin bien sombre, mais j'avais parié sur un mec dans un asile qui cause à un psy. Je n'étais pas très loin finalement mais les rats qui prennent la fuite c'est encore pire.

    Après Lowelyne et Hécate, ça fait trois personnages dont je n'aimerais pas avoir l'enfance. j'aime bien ta façon de mêler le probable au malsain, de faire petit à petit venir l'ombre mais de nous faire sentir dès le début qu'elle viendra. Les mots en gras de Thibald m'ont heurté au début parce que je l'imaginais plus calme, mais ça m'a fait comprendre qu'il était fou.

    Il y a juste une chose qui me manque un peu, un petit regret. C'est que ton personnage ne détaille pas plus le moment le plus fort pour moi de l'histoire, à savoir quand il fugue. J'aurais aimé lire des choses qui me frappent, comme le fait qu'il soit étonné de découvrir que le dehors est bien réel et pas juste sur écran, le faire tenter une première fois de s'échapper mais qu'il découvre en échouant que cette cage qu'il déteste le protège aussi de l'inconnu ou le faire aller le plus loin possible le plus vite possible, comme si la maison allait grossir ou le poursuivre. Ca aurait marqué une déchirure encore plus forte avec son passé, ici au final les choses se font plutôt simplement et l'entendre détailler ce moment où il s'est libéré (et qu'il aimerait sans doute reproduire au moment où il raconte) aurait été un plus.

    Mis à part ça, l'ambiance est bien marquée et j'ai relu deux fois le dernier paragraphe pour bien le digérer. Merci pour ce partage et au plaisir de te lire à nouveau dans de nouvelles aventures.

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    Webster". I was actually excited enough to post a thought :) I do have a couple of questions for you if it's allright. Is it only me or do a few of these comments come across as if they are written by brain dead visitors? :-P And, if you are writing on other places, I would like to keep up with anything new you have to post. Could you make a list every one of your community sites like your linkedin profile, Facebook page or twitter feed?

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Merci pour le commentaire